Bordeaux, deux mois pour mûrir

30/03 - 13:31 | Il y a 10 ans

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À huit journées de la fin du championnat, les Girondins vont aborder le sprint final avec un espoir ténu de décrocher l’Europa League directement via la 4eme place. Un challenge pas irréaliste mais qui demandera à Bordeaux d’être performant à chaque rencontre.

La forme de l’équipe

Moyen plus, c’est peut-être l’appréciation que délivreront les observateurs en fin de saison si les Girondins de Bordeaux en restent là. 6emes au classement, les Bordelais avaient l’opportunité d’entretenir le rêve européen en s’imposant à Toulouse. Avec la perspective d’une réception de l’Olympique de Marseille, après celle du RC Lens, les joueurs de Willy Sagnol auraient pu se placer en embuscade pour la 3eme place dans un championnat un peu décousu laissant la place aux surprises. Mais cette défaite en terres toulousaines, précédée d’une brillante victoire face à Paris, a renvoyé les Bordelais à un seul objectif, lui aussi fortement compromis : aller chercher l’Europa League. Un goal average de +1, quelques revers cinglants (0-5 à domicile contre Lyon, 3-0 à Paris), et des victoires de prestige face à Monaco et Paris (4-1 et 3-2) caractérisent une équipe peu lisible et très inconstante. Maintes fois évoquée par les joueurs, les dirigeants et les entraîneurs, la faiblesse face aux petites équipes qui aurait plombé les espoirs girondins ne tient pas. Car Bordeaux a autant connu de désillusions face aux promus en partageant notamment les points à domicile face à Caen (1-1) ou à Metz (0-0) tout en perdant à Marseille et Paris, face à Lyon à domicile, ou en concédant le nul à Monaco dans une période où l’équipe de Leonardo Jardim n’était pas au mieux. Sans éclat, en gagnant seulement deux de ses matchs en championnat par deux buts d’écart ou plus, Bordeaux n’a jamais réussi à décoller une deuxième fois après un début de saison presque parfait, stoppé par un nul à domicile face à Bastia puis une défaite à Guingamp (2-1). À huit journées de la fin, les Girondins vont devoir se faire violence en affichant une grande régularité dans la victoire pour espérer jouer l’Europa League dans le nouveau stade.

Les joueurs, l’effectif

Les statistiques individuelles des joueurs dessinent à merveille la saison bordelaise. Seuls Mariano et Nicolas Pallois en défense dépassent les 19 matchs joués. Au sein d’une ligne arrière relativement fébrile, 10eme de sa catégorie au classement, les joueurs bordelais ont eu du mal à créer un rempart solide. Entre blessures, méformes et changements de sytèmes de jeu, Bordeaux a jusqu’ici manqué de cohérence défensive. Au milieu de terrain, Jaroslav Plasil a disputé 27 matchs, seulement devancé par Cédric Carrasso (29) et Diego Rolan (28). Auteur d’une seule passe décisive, le Tchèque a peut-être pâti de son positionnement assez éloigné des attaquants. Nicolas Maurice-Belay, Wahbi Khazri et Thomas Touré, auteurs de 4 passes décisives chacun n’ont pas toujours été alignés ensemble, et ont déçu dans certaines rencontres où tous trois étaient titulaires comme lors du match aller face à Nantes (défaite 2-1). Au niveau des buteurs, Diego Rolan domine le classement bordelais avec 11 buts, devant Diabaté et Khazri (8 buts). Un Diabaté suppléé par Isaac Kiese-Thelin depuis son opération au genou, au même titre que Grégory Sertic, remplacé dans le onze titulaire par Clément Chantôme en raison de performances décevantes. Des joueurs irréguliers, capables de coups d’éclats et de matchs sans intérêt, caractérisent l’effectif bordelais. Malgré des statistiques souvent correctes, le collectif n’a pas réussi à s’imposer parmi les meilleurs jusqu’à cette 31eme journée. Il reste huit rencontres aux joueurs pour améliorer leurs statistiques et le futur bilan que dresseront les analystes et la presse au moment d’observer la saison bordelaise.

L’objectif : envisager encore l’Europe ou l’oublier ?

« Se qualifier pour l’Europe ». C’est le message dans toutes les bouches presque chaque saison aux Girondins. Ce discours, ces dernières années, traduit dans les dernières foulées du championnat une ambition de se qualifier pour l’Europa League. Cette saison Bordeaux devra aller chercher Monaco, actuellement 4eme avec 5 points de plus et un match en retard à disputer face à Montpellier, et lutter avec Saint-Etienne et… Montpellier. À moins que le jeu des victoires en coupes nationales, avec le PSG finaliste de la Coupe de la Ligue, ne libère une place supplémentaire via le championnat. En attendant de voir cette hypothèse se concrétiser, Bordeaux ne peut que s’intéresser à la 4eme place. Si la tâche paraît compliquée après le revers à Toulouse, le calendrier chargé de Monaco avec un quart de finale à disputer en Ligue des Champions face à la Juventus Turin en plein mois d’avril, peut changer un peu les perspectives. Au même moment, Bordeaux recevra trois fois (Lens, Marseille et Metz) et se déplacera à Lille. Se qualifier pour l’Europe League demandera une augmentation significative du rythme et une régularité qui fuit les Girondins depuis leur mois d’août presque parfait (3 victoires, 1 nul).

La possibilité de revenir sur la quatrième place n’est pas inexistante à l’étude des données des quatre dernières saisons. Une fois sur deux, le 4eme avant la 31eme journée n’occupe plus ce rang lors de la dernière journée : en 2010/2011 Rennes abandonna son fauteuil au PSG et en 2012/2013 Nice croqua l’AS Saint-Etienne sur la fin. Pour terminer sur la 4eme marche, Bordeaux devra compter sur un buteur avec au moins 14 réalisations et un passeur à 6 unités minimum si l’on se calque sur les quatre derniers 4emes de L1. Nênê (14 buts), Lisandro (16), Cvitanich (19) et Kalou (16) sont les attaquants auxquels devra succéder Diego Rolan. Avec 11 buts au compteur, l’Uruguayen devra absolument confirmer qu’il réalise sa meilleure saison à Bordeaux pour envoyer son équipe en Europe. Enfin, qu’il s’agisse de retrouver une défense imperméable, ou une attaque forcenée, Bordeaux pourra choisir, mais devra mettre des moyens en oeuvre. Mis à part le LOSC la saison passée (2eme défense), Lyon, Nice ou le PSG ces dernières saisons ont terminé respectivement 14emes et 8emes au classement des défenses mais ont obtenu de bien meilleurs classements offensifs (6eme pour Nice, 5eme pour le PSG, et 4eme pour Lille et Lyon). Les Girondins actuellement 10emes au classement des défenses et 6emes au classement des attaques peuvent encore espérer, mais vont devoir améliorer significativement leurs statistiques dans au moins un des deux domaines pour concurrencer Monaco qui n’a que la 9eme attaque de l’exercice mais la meilleure défense du championnat.

3 questions à… Imanol Corcostegui (Journaliste à www.lequipe.fr - Passionné des Girondins de Bordeaux)

WebGirondins : Parler d’Europa League pour Bordeaux, est-ce encore crédible ?

Imanol Corcostegui : L’Europa League est encore jouable, mais en tant que supporter j’aurais tendance à dire que je n’y crois pas trop. Il y a quelque chose de récurrent à Bordeaux, peut-être plus qu’ailleurs, c’est l’imprévisibilité. Bordeaux est capable de réaliser des performances intéressantes, et au moment de concrétiser, l’équipe déçoit. On avait fait un papier sur notre site (www.lequipe.fr) sur l’inconstance bordelaise et ces hauts et bas qui caractérisent le club depuis trois ans. On remarque qu’il y a une constante dans les discours de Francis Gillot et Willy Sagnol concernant les joueurs : ils soulignent une incapacité à se transcender sur la longueur. Peut-être que si l’on se fie à la qualité des joueurs, nous avons le classement que nous méritons. Nous pouvons encore accrocher la 4eme ou la 5eme place, mais il faudrait du mieux dans l’esprit.

WebGirondins : Sur quels motifs d’espoirs pouvons-nous nous reposer en cette fin de saison ?

Imanol Corcostegui : Je ne sais pas trop quoi penser car j’ai quand même du mal à y croire. Il faudrait se reposer sur un cycle vertueux, caractérisé par des victoires et un style de jeu bien défini, mais cela prend plusieurs mois pour mettre cela en place. Peut-être que le losange que veut instaurer Sagnol peut marcher, mais là encore, il faudrait du temps pour que cela prenne. On peut aussi espérer que des équipes devant cèdent du terrain, ce qui n’est pas impossible, et que quelques leaders comme Sané ou Khazri portent l’équipe. Le propre des équipes irrégulières c’est justement de surprendre tout le monde, alors pourquoi pas maintenant ? Enfin, ce qui rend cette fin de saison excitante, c’est la perspective du dernier match à Lescure face à Nantes.

WebGirondins : Est-il encore possible de faire confiance à cette équipe ?

Imanol Corcostegui : J’ai quand même envie de défendre les joueurs, je crois qu’à un moment donné, ils font aussi ce qu’ils peuvent. Je crois en leur bonne foi. Peut-être que Bordeaux rentre dans le rang car la gestion déçoit. On s’est renforcés au mercato d’hiver et ça fait plaisir mais on se rend compte qu’il y a un souci car ce marché est censé permettre d’apporter des ajustements et non pas des investissements pour installer deux titulaires. Cette absence de stratégie sur le long terme me déçoit. Pour réintégrer le Top 4, il faudrait une vraie vision sur le long terme.

Florian Rodriguez

#Ligue1