Exclu – Kaba Diawara « J’aurais aimé me poser à Bordeaux »

22/11 - 06:45 | Il y a 10 ans

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Dimanche soir (21h), l’OM accueillera Bordeaux à l’occasion de l’affiche de la 14e journée de Ligue 1. Kaba Diawara, qui a évolué dans les deux clubs au cours de sa carrière, conserve aujourd’hui encore un certain attachement aux Girondins. Entretien avec l’ancien joker de luxe bordelais. 

Vous avez mis un terme à votre carrière de joueur en 2012. Que faites-vous depuis que vous avez raccroché les crampons  ?

J'ai été chroniqueur dans l'émission The Specialists de Canal+. Lors de la dernière Coupe d'Afrique des Nations, en 2013, j'étais consultant pour cette même chaîne. Sinon, je fais des piges régulières pour Canal+ Afrique. J'ai souvent l'occasion de commenter un match ou deux par semaine. Il s'agit souvent de matches que Canal+ France ne retransmet pas. Par exemple, ce week-end, je vais commenter la rencontre entre l'Atletico de Madrid et Malaga, pour le compte de la 12e journée de Liga. Mardi prochain, ce sera un match de Ligue des champions, celui opposant l'APOEL Nicosie au FC Barcelone. 

Si l'on compte les clubs où vous avez été prêté,  vous avez porté les couleurs de 18 formations au cours de votre carrière. Comment expliquez-vous que vous ne soyez pas parvenu à vous stabiliser dans une équipe en particulier ?

Beaucoup de personnes pensent que comme je suis passé par 18 clubs, j'ai perçu 18 primes à la signature. Ça renvoie une image de mercenaire, avec l'instabilité qui va avec. Et sincèrement, ça m’a soûlé. C’est réducteur, ça ne résume pas du tout ma personnalité. Nicolas Anelka souffre également d'une telle image, pourtant les gens ne le connaissent pas et le jugent sans savoir…

Dans quel club auriez-vous souhaité vous stabiliser ?

A Bordeaux, j'aurais vraiment aimé me poser. Mais Élie Baup ne me faisait pas trop confiance. Même après mon doublé avec les Girondins au Stade Vélodrome, il ne me faisait pas jouer (saison 1998-1999 : Bordeaux fait match nul 2-2 à Marseille, Kaba Diawara inscrit un doublé, Ndlr). Aujourd'hui, un jeune joueur qui vivrait une situation similaire péterait un plomb. Mais, à cette époque, les Espoirs ne disaient rien. Même si ce n'était pas de l'esclavage, c'était dur à vivre. Lorsque Jean-Pierre Papin était à la rue, à la fin de sa carrière, il fallait quand même attendre son tour pour jouer...

En voulez-vous toujours à Élie Baup ?

Attention, je ne suis pas fâché avec lui. Il avait juste peur de lancer un jeune et préférait mettre de « vieux » professionnels. Les jeunes savaient qu'ils ne devaient pas parler trop fort à cette époque. Dès que j'ai pu « m'enfuir », je suis parti. En restant chez les Girondins, j'étais certain d'être cantonné à mon rôle de joker. Avant le Mondial 1998, j'étais international Espoir. Je sais qu'Aimé Jacquet avait parlé de moi à Ibrahim Ba et lui avait confié qu'il appréciait mon jeu.

Vous avez joué trois saisons aux Girondins (quatre sous contrats en englobant les prêts). Que retenez-vous principalement de votre aventure bordelaise ?

L'ambiance qui régnait : c'était comme une famille, on se voyait en dehors des entraînements et des matches. Je me rappelle notamment d'une pendaison de crémaillère chez Lilian Laslandes où on s'était vraiment bien amusé. 

Vous avez participé à la première partie de l'exercice 1998-1999, qui mènera Bordeaux au titre de champion de France. Avez-vous une anecdote à propos de cette saison de rêve ?

Ali Benarbia avait été recruté en provenance de Monaco lors de l'été 1998. « On va être champion », avait-il prédit dès les premiers entraînements. Un discours rare pour un joueur bordelais, sachant que chez les Girondins, il ne faut jamais afficher trop d'ambitions. Ce gars m'a marqué. Son objectif principal était que les attaquants avec lesquels il jouait terminent en tête du classement des buteurs à la fin de la saison. C'est exactement ce qu'il s'est passé lors de l’exercice 1998-1999, à l'issue duquel Sylvain Wiltord a fini en tête des buteurs, avec 22 réalisations. Quant à Lilian Laslandes, il figurait en troisième position (15 buts). 

« Les dirigeants bordelais font confiance aux anciens »

Quels souvenirs gardez-vous de votre fabuleux doublé face à l’OM ? 

J'étais en mode revanchard, car je ne devais pas jouer cette rencontre au départ. Lilian Laslandes revenait de l’équipe de France, il avait dit à Baup qu’il se sentait fatigué. « Fais jouer Kaba », avait-il demandé au coach. Baup m’avait alors appelé dans la foulée pour me dire que je serai aligné. J’étais arrivé avec une mentalité de guerrier sur la pelouse marseillaise. C’est le match qui m’a révélé au grand public, il passait sur Canal+ un dimanche soir et était commenté par Aimé Jacquet et Thierry Gilardi. 

Avez-vous eu des contacts pour revenir à Bordeaux ?

Des contacts ont existé pendant ma carrière de joueur professionnel, après mon passage à Nice en 2003. A l’époque, j'appartenais au PSG. J’étais trop cher pour que Bordeaux puisse me récupérer... Depuis que j’ai raccroché les crampons, je n’ai pas eu de propositions pour intégrer le staff girondin. C’est dommage, car Bordeaux est une ville que j'apprécie. Après, dans le football, on ne sait jamais… Récemment, je suis retourné au Haillan. J’ai pu y croiser Patrick Battiston, celui qui m'a fait venir en 1995. Les dirigeants bordelais font confiance aux anciens, Marius Trésor en est un bon exemple. 

Que pensez-vous de l'évolution du club ces dernières saisons ?

Le club se porte bien mais il faudrait une décision importante. Soit les dirigeants mettent les moyens pour côtoyer les « gros », soit ils décident que Bordeaux reste le club sympa, qui joue chaque saison entre la quatrième et la huitième place de Ligue 1. Il n’y a pas de mystère : il faut de l’argent. Peut-être que M6 devrait passer la main, sans partir totalement, en prenant par exemple moins de parts. 

Comment trouvez-vous l’équipe cette saison ? 

Elle fonctionne bien, les résultats sont satisfaisants et le groupe vit bien. Un joueur comme Diego Rolan commence à s'adapter. On lui a laissé le temps. Des jeunes issus du centre de formation comme Lamine Sané ou Henri Saivet ont également eu cette chance. Sincèrement, je suis content pour eux.  

Bordeaux se déplace à Marseille dans quelques heures, à l’occasion de l’affiche de la 14e journée de Ligue 1. Vous avez porté le maillot de ces deux équipes au cours de votre carrière. De quel côté penchera votre cœur dimanche soir ?  

Je reste attaché à Bordeaux. Cette rencontre entre Olympiens et Girondins s’annonce comme un match de gala, ce sera l’opposition phare de la journée. Marseille joue de manière très offensive depuis le début de la saison,  les hommes de Bielsa voudront se racheter après leur défaite à Paris (2-0). Quant aux Girondins, ils ne fermeront probablement pas le jeu. Tous les ingrédients sont réunis pour voir un beau match !

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