Exclu - V. Duluc : « Une bonne saison de Bordeaux passe par un mercato réussi »

17/07 - 07:00 | Il y a 7 ans

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Grand reporter à L'Equipe, Vincent Duluc fait le tour de l'actualité bordelaise en exclusivité pour WebGirondins. Entretien. 

Web Girondins - Cédric Carrasso, après 8 saisons passées au club, a été remercié sans hommage. Comment expliquer ce manque de reconnaissance du club vis-à-vis d'un joueur emblématique ?

Vincent Duluc - Le club a le droit de décider à quel moment il veut tourner la page. Mais quel est le bon moment pour le faire ? Ce n'est jamais évident de le savoir. Pour Andrea Pirlo à la Juventus Turin, le départ est survenu trop tôt par exemple. Concernant Cédric Carrasso, il a eu la reconnaissance salariale, celle des contrats, etc. Faut-il en plus une récompense à la fidélité ? Je n'en suis pas sûr. Après, peut-être que les Girondins auraient pu lui prévoir une meilleure sortie. Mais qu'ils changent de gardien ne me choque pas. Gourvennec doit construire la meilleure équipe possible. 

Comment expliquez-vous le flop Jérémy Ménez ?

C'est entièrement de sa faute. Ménez n'a pas su profiter d'un club structuré pour redevenir un joueur de haut niveau. Cela résume sa carrière, au cours de laquelle il n'a jamais su saisir réellement sa chance. Ce joueur a toujours pensé qu'il était plus talentueux que les autres. Or, pour être un grand joueur, il n'y a pas de secret. Il faut être régulier, ce que n'a jamais été Ménez, même s'il a effectué quelques bonnes saisons. Mais à l'arrivée, on retiendra plus ses fulgurances. 

Comment jugez-vous le mercato bordelais pour le moment ? 

Les dirigeants de Girondins se trouvent dans une situation qui ressemble un peu à celle de leurs homologues lyonnais. Aujourd'hui, ils n'ont pas la possibilité de recruter des joueurs de tout premier plan. L'arrivée de Vukasin Jovanovic, en provenance du Zénith-Saint-Pétersbourg, est une bonne nouvelle. Par contre, sur le plan offensif, l'éventuel départ de Diego Rolan m'inquiète. C'est tout de même le joueur bordelais qui a marqué le plus de buts en Ligue 1 la saison passée. De toute façon, les Girondins ne pourront pas faire une bonne saison si leur mercato n'est pas réussi. 

Comment imaginez-vous la suite de ce mercato ?

Les joueurs qui seront recrutés doivent impérativement rentrer dans l'idée de jeu que Gourvennec compte mettre en place. C'est sa deuxième année sur le banc girondin et la première a quand même ressemblé à quelque chose. Il a vraiment fait du bien et confirmé ce qu'on pensait de lui quand il entraînait Guingamp. Il doit être le décideur en matière de recrutement, et ce, en imposant sa griffe. 

Pour recruter, les Girondins utilisent souvent la filière sud-américaine. Comment expliquer cette attirance pour les joueurs originaires de cet endroit ?

Le premier argument est historique. Si l'on prend l'exemple du dernier « grand » Bordeaux, celui de la fin des années 2000, on constate que plusieurs Argentins et Brésiliens faisaient partie de l'effectif. Au fil de son histoire, Lyon et le PSG se sont également construits avec des Brésiliens. Tous ces clubs activent des réseaux. Mais maintenant, recruter des Brésiliens peut devenir compliqué avec les problèmes liés à la tierce propriété. 

« Bordeaux n'a pas vocation à finir dans les 5 premiers »

Les joueurs sud-américains sont-ils, en général, de bonnes opportunités pour le mercato des clubs français ?

Le risque est partout. A un moment, le marché des joueurs originaires d'Europe de l'Est était en vogue. Il y a aussi eu un focus sur le marché africain. En réalité, il n'existe pas d'eldorado. Il y a les cellules de recrutement qui travaillent bien et les autres. Après, il y a toujours le facteur chance qui peut entrer en jeu. Le scouting est souvent un problème des clubs français. 

Quelle place doit viser Bordeaux cette saison ? 

Cette saison, Bordeaux n'a pas vocation à finir dans les 5 premiers. Paris demeure hors course et Monaco sera encore très compétitif malgré la perte de joueurs essentiels. Il est encore compliqué de cesser de croire en Nice. De son côté, Marseille effectue un bon recrutement. Lyon, je ne sais pas vraiment ce que ça va donner... Si les Girondins terminaient 5ème ou 6ème, ce serait une belle réussite. Au-dessus, ce serait un exploit.

Et en Europa Ligue, quel stade de la compétition les voyez-vous atteindre ? 

Déjà, Bordeaux doit jouer cette compétition à fond. L'an passé, j'ai suivi toute la saison européenne de Lyon. On voit des ambiances exceptionnelles en Europa Ligue. Le public est moins embourgeoisé que pour les matches de Ligue des champions. Ça servirait à quoi de « se casser les fesses » à se qualifier en C3 et ensuite ne pas la jouer ? Depuis quelques temps, je trouve que cette compétition a repris une vraie place. Elle est mieux traitée sur le plan médiatique, notamment parce que le public peut la suivre gratuitement. Pour revenir à la question, il faudrait que Bordeaux dispute au moins la phase de poule et prenne ensuite de l'expérience dans les matches aller-retour. L'idéal serait de jouer au moins au moins un tour après avoir franchi la phase de groupe. 

Quel avenir imaginez-vous pour Gourvennec à Bordeaux ? Va-t-il vraiment s'inscrire dans la durée ?

Pour n'importe quel entraîneur, il est compliqué de voir au-delà de trois saisons. Personnellement, je le vois rester cette saison et celle d'après. S'il réussit à Bordeaux, il sera extrêmement sollicité (Il l'était déjà beaucoup lorsqu'il coachait Guingamp). Il aura alors mérité d'aller voir plus haut, à l'étranger ou en France. 

Avec un nouveau président, un nouveau directeur sportif et un coach qui dispose d'une stabilité pour travailler, Bordeaux est-il entré dans une nouvelle ère ?
J'ai l'impression que c'est la suite d'une ère où Bordeaux n'a plus les moyens d'être champion. Ce serait plutôt une nouvelle ère dans la reconstruction. Mais le club est toujours en phase de reconstruction. Il va falloir, à un moment, que quelqu'un mette de l'argent. Ce n'est facile de se développer quand le propriétaire ne veut pas injecter davantage...

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